Je vous préviens, ce billet s’annonce comme un véritable coup de gueule !
Lors de mon séjour à Bruxelles il y a quelques jours, j’ai eu l’occasion de tester un cours de Hot Yoga. J’avais d’ailleurs rédigé un billet sur cette expérience riche en émotions.
Dans ce billet, j’évoque un point qui m’a marquée pendant le cours. « Marquée » n’est d’ailleurs pas le mot juste. Je pourrais dire « dérangée » mais ça resterait soft.
Ce point de détail, ce sont les miroirs du studio de yoga.
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Je suis la première à entrer dans cette salle chauffée à 37°c. Je repère le tapis du prof. Il est placé dos aux miroirs. En 20 ans de scolarité, s’il y a bien une chose qui n’a jamais changé, c’est la place que je choisis dans une salle de classe. Toujours celle qui est la plus au fond de la classe. Ni une ni deux, même en cours de yoga, je retrouve mes bons vieux réflexes, prenant soin d’aller me caler tout au fond à droite de la salle.
Je place mon tapis sur les petites marques au sol. Hein ?! Oui, des marques au sol. Pour bien indiquer où mettre ton tapis et être sûr que l’espace de la salle sera parfaitement optimiser. J’aime pas bien ça. Juste le fait de savoir que mon tapis sera à 5cm de celui de mon voisin, ça me gave. Alors ok, je me réjouis de voir que nous sommes de plus en plus nombreux à faire du yoga. Je me réjouis de voir les salles se remplir. Mais non, désolée, je ne kifferai jamais assister à un cours où on est 50. Idem côté prof. Je n’ai pas envie d’enseigner à 50 yogis en même temps. Comment tu veux faire attention à tout le monde et être là pour chacun quand tu es 50 ? C’est encore un truc qui me dépasse totalement même si je crains devoir revoir mes standards un jour où l’autre.
Bref, voilà les 50 yogis qui arrivent, justement. A ma grande surprise, les premiers arrivés prennent place le plus près possible des miroirs. Les suivants essayent de se caler juste derrière les premiers, prenant bien soin de pouvoir s’admirer dans les glaces. Enfin, ce sont les pauvres retardataires qui finiront par se résoudre à venir caler leur tapis près du mien.
Une chose est sûre, dans ce ballet incessant, chacun cherche à s’installer de façon à voir son reflet dans les miroirs. Je suis un peu consternée.
What The Futch ?!
En fait, je suis révoltée. Je ne comprends pas bien le délire. Suis-je véritablement dans un cours de Yoga ?
Bref…
La chaleur atteint son paroxysme et le cours commence.
Dos au miroir, le prof décrit les postures et les pratique avec nous. A de trop nombreuses reprises, il fait référence aux miroirs.
« Etirez-vous vers les miroirs », « Observez-vous », « Allez chercher plus loin en regardant le miroir », « Restez concentrés sur le miroir ».
« RESTEZ CONCENTRES SUR LE MIROIR » ????
J’hallucine.
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En fait, si j’ai bien compris, tout se passe autour de l’image que l’on renvoie dans ce fameux miroir. Et l’intériorisation dans tout ça ?
J’avais cru comprendre que le yoga nous permettait de voir au-delà de notre enveloppe corporelle et d’aller explorer nos 4 autres koshas… J’ai dû me gourer.
Allez, c’est pas parce que c’est un billet coup de gueule qu’on n’a pas le droit d’apprendre des trucs.
Pour info en yoga, on compte 5 enveloppes de l’âme. C’est ce que l’on appelle les 5 Koshas.
- Anandamaya Kosha, l’enveloppe de félicité
- Vijnanamaya Kosha, l’enveloppe de connaissance – intellect et intuition
- Manomaya Kosha, l’enveloppe sensorielle et du mental conscient
- Pranamaya Kosha, l’enveloppe d’énergie
- Annamaya Kosha, l’enveloppe physique
Selon le yoga, nous sommes tous constitués de ces 5 enveloppes. De manière générale, nous n’avons pas trop de problème à identifier l’enveloppe physique. C’est notre corps tel qu’on le connaît et dans lequel on vit depuis un paquet d’années maintenant.
Il arrive également que nous puissions identifier, ressentir, visiter notre enveloppe énergétique, voire même notre mental conscient. La pratique régulière du yoga et de la méditation nous aide à appréhender plus intensément ces 2 enveloppes.
En poursuivant la pratique du yoga de manière assidue, il est également possible de se connecter à l’enveloppe de connaissance.
Quant à l’ultime enveloppe, celle de la félicité, il faudra probablement s’armer de beaucoup de patience et de sagesse pour pouvoir la visiter
Revenons maintenant à nos miroirs et aux conseils avisés de notre prof d’un jour. Se tourner vers les miroirs, se regarder en train de faire du yoga, c’est carrément un non-sens pour moi. On reste au premier niveau. Celui du corps. On ne cherche pas à aller dans plus de subtilité.
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Pour ma part, j’étais trop loin des miroirs pour pouvoir me voir. Et quoi qu’il en soit, je n’en avais pas envie. J’avais déjà le mental qui turbinait à 2 000km/h, encore heureux que j’avais autre chose à faire que de me concentrer sur mon reflet!
C’est un fait, ce genre d’enseignement ne me correspond pas du tout. Néanmoins, j’ai essayé de trouver des intérêts à l’utilisation des miroirs en yoga. Feront-t-ils le poids? Pas sûr…
Pour
Observer l’alignement du corps et ajuster les postures.
Il arrive en effet souvent que l’on ait cette impression bizarre d’être tordu alors que ce n’est pas le cas. A l’inverse, on peut se sentir parfaitement aligné et droit alors que pas du tout. Dans ce cas, les miroirs peuvent être utiles. Ils nous aident à réajuster nos postures pour se mettre dans l’axe, dé-cambrer les reins, relâcher les épaules etc.
Et, … Ah bah non c’est tout.
Contre
Ça n’engage peut-être que moi, mais en mettant des miroirs dans les salles de yoga et en incitant les élèves à les regarder, est-ce que l’on ne participerait pas un peu au développement de l’ego ???!
Rappelons quand même le grand principe du Yoga:
[inlinetweet prefix= » » tweeter= »My Happy Yoga » suffix= »#my_happy_yoga #myhappyyoga #yoga »] »Yogaś citta-vritti–nirodhaḥ« [/inlinetweet]
Le Yoga est la cessation des perturbations du mental.
Pour parvenir à stopper ces fluctuations mentales, le yoga fait appel à diverses techniques: asanas (postures), pranayamas (techniques de respiration), chants, méditation etc.
Ces « techniques » visent à améliorer la concentration et à se rapprocher de notre être intérieur. Cet être de lumière, ce moi profond, immuable et imperturbable qui se cache trop souvent derrière cet autre moi: l’ego.
L’ego se nourrit des perturbations du mental. Jugements, culpabilité, vengeance, doutes etc. elles-mêmes stimulées par les possessions matérielles, les désirs ou les apparences.
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L’apparence. Préoccupation universelle et source de souffrance.
Dans notre quotidien, nous sommes tous confrontés à notre apparence et aux jugements sur celle-ci. Qu’ils soient positifs ou négatifs d’ailleurs, là n’es pas la question. Mais peut-être que de temps en temps, une fois par semaine par exemple, et surtout quand on vient pratiquer le Yoga, on aimerait bien qu’on nous foute la paix avec cette apparence.
Je pense que les miroirs dans une salle de yoga, qu’ils soient ouvertement utilisés à la demande du prof ou simplement présents, ne font qu’exacerber les problèmes de l’ego.
Et d’ailleurs, cela concerne autant les personnes à haute estime de soi (ego un peu trop dominant) que les personnes à basse estime de soi (manque de confiance).
Dans les 2 cas, les miroirs ne vont faire que démultiplier les effets. Une personne dont l’ego est déjà bien gonflé sera ravie de pouvoir s’observer pendant 1h et se féliciter de ses prouesses (d’ordre purement physique du coup). A l’inverse, une personne qui n’a pas confiance en elle ne verra dans le miroir que le reflet d’une succession d’échec.
Sans oublier que dans ce genre d’espace, non seulement l’on peut voir son reflet, mais l’on voit aussi celui des autres! Une aubaine pour attiser les comparaisons et les jugements!
Bref, si les miroirs peuvent être utiles dans certains cas (et encore, le rôle du prof n’est-il pas aussi celui d’observer ses élèves pour éviter blessures et les ramener dans l’alignement ?), pour moi, c’est malsain.
Et vous, que pensez-vous des miroirs dans les salles de Yoga? En avez-vous déjà fait l’expérience? Racontez-nous!





