Professeur de yoga, un métier qui rapporte ?

La question à 1 million d’euros à laquelle même Google ne peut pas répondre. Est-ce que l’on peut vivre du yoga ? Au cours des small talks que l’on a tous, ces fameuses conversations un peu creuses qui, fort heureusement, mènent parfois à des discussions plus profondes, ça se passe peu ou prou toujours de la même façon :
-« Et toi tu fais quoi dans la vie ? »
-« Je suis prof de yoga »
-« Ah super. Et du coup à part ça ? »
-« Bah c’est tout. C’est mon métier, quoi. »
-« Ah… Ok. »
S’en suis donc parfois la fameuse question à un million d’euros « Mais du coup on peut vivre du yoga ? »
Légitime interrogation.

Peut-on vivre du yoga ?

Il y a douze ans, je quittais mon ancienne vie pour croquer pleinement la nouvelle sous le signe du yoga. Passer de salariée à indépendante, un choix radical impliquant sacrifices et engagement constant.

Je m’étais donné deux ans pour sortir un revenu correct de mon activité. Deux ans pour pouvoir dire, « Ça y est les gars, maintenant je vis du yoga ! » Cette deadline de Juin 2017 était mon moteur. Parfois aussi, elle était la source de mes angoisses.

Est-ce que j’ai tenu le challenge ? Oui ! Deux ans après m’être lancée, et même avant pour être honnête, je pouvais déjà me targuer de gagner aussi bien ma vie qu’avant.

Comment j’y suis arrivée ? Et à quels prix ? Je vous raconte ces 2 premières années épiques !

Retour en Juin 2015 aux premiers jours du reste de ma vie. L’été est déjà là et ses journées radieuses m’invitent à l’insouciance. Pendant les premières semaines, je profite de ma liberté. Je flâne, je glande bref rien de bien productif, mais nécessaire. Je pratique le yoga, bosse sur le blog et m’enrichis de nouvelles rencontres.

Si tu veux mon avis, la saison Printemps/Eté est la meilleure pour démarrer une nouvelle vie. M’enfin je dis ça…

Nonobstant la glandouille de façade, les choses se mettent peu à peu en place dans ma tête et sur mon agenda. La rentrée approche à grands pas et c’est LE moment où il ne faut pas se foirer. Je m’attelle donc tout l’été à préparer cette rentrée, trouver mes premiers cours et faire rentrer les premiers sous.

À l’approche de cette rentrée 2015, un événement perso bouleverse ma vie et remet par la même en cause tous mes projets pro. Je perds alors tous mes repères et ne sais plus très bien quoi faire de ma vie. Je suis paumée, quoi. Totalement paumée.

Je déménage sans vraiment déménager, stagnant dans une ville qui n’a plus grand chose à m’apporter. Alors entre Paris et Grenoble, ni l’une ni l’autre de ces villes ne me fait vraiment rêver. Moi qui m’amuse à crier sur le toits que « le monde est ma maison et le ciel est mon toit », je ne me sens, à ce moment, nulle part chez moi. Ces derniers mois passés à Grenoble ont fait partie des plus difficiles. Je quitte finalement la ville, y laissant des amis chers et regrettés. Je ne sais toujours pas où aller.

L’hiver est pénible et long. Trop long.  J’ai cette hargne de bosser, je crève d’envie d’avancer, mais vers où ? Vers quoi ? Pendant tout ce temps, les sous peinent à rentrer et ma motivation finit par s’étioler.

Nous voilà déjà arrivés au Printemps 2016. Enfin, ma décision est prise, j’emménage à Paris. Le verre est à moitié plein et, une fois n’est pas coutume, la belle saison me donne des ailes. Des mois que j’attends de retrouver la stabilité. Enfin ! Je reprends mes marques dans cette capitale que j’ai laissée 5 ans plus tôt.

L’été approche et après lui, la rentrée. Pas le moment de chômer !
Je mets de côté certains principes à la con que j’avais embarqués dans mes cartons :
« Un CV ? Pour postuler comme prof de yoga ?? Blague ! J’ai passé des années à faire des CVs et passé des entretiens en mode snob, hors de question qu’une fois arrivée dans le yoga je me colle à ce genre de protocole ! Faut pas déconner ! »

Hum… J’ai finit par ranger mes principes débiles, j’ai pondu un joli CV et j’ai postulé dans des dizaines et des dizaines de studios. J’ai envoyé des centaines de mails, fait des relances tous les 3 mois. J’ai passés des coups de fil peu concluants, des entretiens encore moins. J’ai même fait des cours d’essai gratos ! J’ai rencontré des gens formidables et d’autres beaucoup moins. J’ai découvert que le monde du yoga était un monde d’entreprise comme les autres. Bref, je me suis pris quelques claques, le prix à payer pour accepter la réalité.

Malgré mon énergie et mes relances, je n’ai que très peu de retours à mes candidatures. Je ronge un peu mon frein.

Et puis vient le premier entretien. Je débarque dans ce studio, naïveté et préjugés bien en main. Ma motivation est néanmoins à 200%. Malgré tout, je ne suis pas à l’aise. La gérante se prend déjà pour ma copine, tout le monde se tutoie mais tu sens qu’il y a un truc qui cloche. Difficile à expliquer. Juste un ressenti global, comme un manque de sincérité dans l’histoire. Et puis la gérante me dit « Tu sais ici les filles viennent au yoga parce que c’est à la mode. Tout le monde est jeune et beau. Elles vont elles viennent et ne s’occupent de rien d’autre. Pas le temps de discuter, tout le monde ici est toujours très pressé. » Youhou ça a l’air tellement fun ! Sous couvert de ma diplomatie légendaire, j’ai gentiment expliqué que MOI je ne fonctionnais pas comme ça.

Évidemment avec le recul, je me suis dit que j’ai peut-être été un peu bête de rester camper sur mes positions. Qu’est-ce qu’on s’en fout des raisons pour lesquelles ces nanas viennent au yoga ? M’enfin à l’époque, je pensais n’avoir rien à leur apporter. C’était peut-être vrai, d’ailleurs. On ne le saura jamais.

Et puis avec le temps et au fil des belles rencontres, les choses se sont construites. Mon agenda se remplit, je travaille avec plein de personnes différentes et toutes aussi chouettes les unes que les autres. Je bouge, je donne des cours à 1, 2, 10 ou 150 personnes ! Bref je m’éclate.

À la fin de ces 2 premières années de ma vie de prof de yoga, j’ai aussi vécu une expérience de fou :

À l’occasion de l’événement Run at Work organisé par Amaury Sport (entre autres humbles organisateurs du Tour de France et du Dakar) j’ai eu la chance de donner un cours exceptionnel sur le parvis de la Défense. Près de 200 yogis venus écouter mes blagues pourries et mes histoires de yoga. Une folie pure. Je n’oublierai jamais cette expérience de dingo. D’ailleurs depuis, je rêve de réitérer le projet !

Un métier qui rapporte, mais à quel prix ?

Alors oui, objectif atteint. En 2 ans je parviens à me sortir un revenu plus qu’acceptable. Et après ?

La liberté de l’indépendant à un prix. Il s’appelle précarité. Rien n’est jamais acquis. Et encore, dans le yoga, c’est encore plus compliqué que dans d’autres métiers. Non soumis à une véritable législation, le métier de prof de yoga est tributaire de la confiance mutuelle des partenaires. Il n’y a le plus souvent aucun contrat, que des accords tacites. Parfois même uniquement à l’oral. Donc la confiance c’est bien mignon, ok. Mais ça peut quand même poser 2 ou 3 problèmes quand on cherche doucement à te la mettre à l’envers.

Résultat, rien ne t’empêche de te retrouver sans rien du jour au lendemain. Quand je suis arrivée à Paris, j’ai rencontré une prof de yoga qui venait de se faire « arnaquer » par l’un de ses studios de yoga – et que je ne citerai pas même si j’en ai très très envie. Elle a donc quitté le studio du jour au lendemain dans lequel elle donnait 4 cours par semaine. A 50€ le cours, je te laisse faire le calcul… Boum 800€ de moins sur le mois. Du jour au lendemain.

J’ai moi-même dû faire des choix douloureux d’un point de vue financier, parce que j’estime que mes valeurs et le respect de l’humain ne doit jamais passer après l’argent.

Difficile alors de dire que l’on peut vraiment vivre du yoga si un mois sur deux le chiffre d’affaire passe du double au simple. Fort heureusement, il peut aussi passer du simple au double. Et perso, c’est là-dessus que j’ai décidé de mettre le focus.

C’est le lot de l’indép et de l’entrepreneur : nous devons sans cesse nous renouveler et chercher au maximum la stabilisation, sans perdre notre liberté et ce qui nous anime.

Autre point important à souligner, choisir de devenir professeur de yoga, c’est accepter de vivre en décalé. J’ai une chance inouïe de pouvoir vivre ma vie sans être obligée de bosser le week-end (sauf rares exceptions). Mais la plupart des profs ont la majorité de leurs cours le week-end. Bah ouai, logique. On bosse quand les autres ne bossent pas.

Idem le soir, quand tout le monde sort du boulot pour aller prendre l’apéro, c’est l’heure à laquelle toi tu démarres ta journée. Pour la terminer, si tu es chanceux, vers 20h. Sinon compte plutôt 21h, voire 22h.

Ce décalage implique pour moi 2 choses qu’il faut apprendre à gérer. La première, c’est tout simplement ce rythme de vie différent. Dîner à 22h t’arrivera beaucoup plus souvent que tu ne l’imagines.

Encore quand tu vis seule, tu fais bien ce que tu veux. Mais quand tu vis en couple et que tu pars bosser quand il rentre du boulot, ça peut vite devenir frustrant. Et encore, je ne te parle même pas de si tu as des enfants !

Le second point est peut-être encore plus important. Si tu bosses quand les autres ne bossent pas, que fais-tu quand les autres bossent ? Tu suis ? Généralement, bah tu glandes. Y’a rarement des cours de yoga à 15h de l’après-midi. Donc tu ne fais « rien ». Et qu’est-ce qu’il se passe quand tu ne fais « rien » pendant que les autres bossent ? Dans ta tête, c’est le bordel. Ça s’appelle la culpabilité. Mais oui ! Je te jure ! J’ai culpabilisé pendant des mois avant de réaliser que, non seulement c’était vain, mais en plus ça me bouffait. Maintenant, j’en profite.

Et habitant au bord de l’océan aujourd’hui, je peux te dire que je suis bien contente de pouvoir aller braquer quelques vagues à 15h pendant que tout le monde est au bureau !

Bref oui, être prof de yoga, ça peut rapporter. Dans ce métier, on est bien placé.e pour savoir que le travail, la patience et la persévérance ça paye. Alors oui, il faut s’accrocher.

De manière beaucoup plus globale, je suis convaincue que l’on peut vivre de sa passion. Il faut juste s’en donner les moyens et s’attendre à quelques sacrifices. D’ailleurs je vais te dire un truc. Je ne me suis jamais posé la question. Je ne me suis jamais dit « Est-ce que tu peux vivre du yoga ? » « Est-ce que c’est un métier qui peut te rapporter de l’argent ? » J’ai tracé mon chemin et c’est tout. Aujourd’hui j’en vis, demain peut-être pas. Mais je sais que cette route que j’ai choisie d’emprunter est celle qui fait de moi une happy yogini 😉

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Cet article a 10 commentaires

  1. Mona

    Super article, comme d’habitude, Emilie !
    C’est un boulot génial exercé par des personnes géniales… mais dans un milieu compétitif, sans pitié, et avec des rémunérations aléatoires, dirons-nous.
    La précarité est ce qui me fait le plus peur, mais en même temps, j’ai eu énormément de chance jusqu’à présent, alors j’espère que cela continuera lorsque je me lancerai à temps plein, comme toi… Bises !

    1. Emilie

      T’es adorable ! La chance a certainement son mot à dire là-dedans, les belles rencontres et le boulot aussi. Et savoureux mix de tout ça et il ne fait aucun doute que la magie suivra 🙂 Hâte de te voir te lancer à plein temps ! <3

  2. Annick

    coucou Emilie
    moi aussi j’ai vécu cette magnifique expérience, apprécié les temps pour moi, les temps pour les autres. « Donner un cours », quelle belle phrase.
    Mais attention, prévoyez une assurance « prévoyance » pour les « au cazou ».
    Quand la maladie frappe on se dit, je peux me soigner et continuer les cours. On essaie et bof c’est dure. Alors on réduit les cours, on se fait remplacer par une colègue sympa, tu te souviens Emilie ? Malade le jour-même, l’angoisse !!
    Tout prof de yoga que l’on est, on a du mal à faire face. mais il faut quand même payer l’urssaf des derniers mois même si plus rien ne rentre.
    Loin de moi l’idée de plomber l’ambiance et de jouer les bêtes noires pour les jeunes profs qui démarrent.
    Là j’ai tout arrêté, déclaré ma cessation d’activité à l’urssaf.
    je suis plus que jamais lié au yoga, il fait parti de ma vie, de tous mes instants. Il m’est d’une aide énorme.
    opérée de l’oreille interne il y a 3 semaines, merci VRIKSHASANA, SAMASTHITI, SHIVA NATARAJASANA etc pour l’ancrage, la verticalité. C’est un défi pour moi de retrouver l’équilibre de jour en jour, réapprendre à marcher droit sans avoir l’air bourrée.
    Voilà je n’ai plus aucun revenu, 60 balais dans 2 mois, pas de chômage, pas de retraite. Dieu merci mon homme est là, je me repose sur lui.
    Alors, n’hésitez pas à souscrire une assurance, un truc qui assure vos arrières.
    Bonne route en yoga à toutes et tous, c’est un super job mais attention on reste des humains comme les autres, prenez soin de vous.
    Des biz Emilie
    Au fait que conseillerais-tu à un élève pour retrouver l’équilibre suite à cette opération (on m’a ôté le labyrinthe gauche). Du coup mon cerveau ne reçoit des ordres que de l’oreille droite pour l’éuiilibre et l’orientation dans l’espace.
    Je bosse sur la proprioception ….
    bizzzzzzzzz

    1. Emilie

      Hello Annick. Wahou quelle histoire… Je me suis souvent demandée si tu continuais à donner quelques cours mais j’avais cru comprendre que la maladie avait pris le dessus. Je suis absolument désolée de lire cela. ça me fend le cœur de savoir que tu as dû totalement arrêter d’enseigner. Oh que oui je me souviens de ce remplacement au pied levé, merci à toi pour la confiance que tu m’avais accordée alors que j’en étais encore au début de mon enseignement 🙂 Merci aussi de partager tout ça. Je n’ai pas abordé le sujet maladie en effet qui vaudrait presque un article à lui tout seul. L’assurance, j’y ai beaucoup pensé. L’idée fait son chemin. Aujourd’hui, ce qui me préoccupe le plus est de savoir ce qu’il se passera quand je souhaiterais devenir maman… Quels conseils puis-je te donner ? Je suis honorée que tu me poses la question et en même temps j’y mets beaucoup de pression parce que je veux que ma réponse soit à la hauteur… Les équilibres et les postures symétriques en dynamiques t’aideront certainement. Le viniyoga pourrait t’être d’un grand secours. Ma prof Aline Culianez a déménagé à Echirolles mais je pense qu’elle te serait d’une grand aide. Voilà son site: http://yogaetfleurs.free.fr/contact.htm Je pense sincèrement qu’elle sera formidable. Si tu vas la voir, tiens moi au courant 🙂 Je t’embrasse bien fort <3

  3. Joanne PASCAL

    Bonjour Émilie,
    J’ai trouvé par hasard votre site il y a quelques mois déjà et j’avoue que c’est une mine d’or tous vos renseignements, surtout quand on veut devenir prof.
    Comme vous en 2015, je suis au début, je regarde, je prends mes marques. Comme vous dites « je suis paumée » et en attendant que une opportunité se présente, je pratique avec foi.
    En tout cas, bravo pour votre détermination, courage et merci pour votre franchise. Croyez moi que en disant ça je ne suis pas fayotte.
    Une belle journée
    Bien à vous
    Joanne

    1. Emilie

      Bonjour Joanne, Merci infiniment pour ces mots qui me touchent. Je vous souhaite plein de courage également dans ce début d’aventure et de belles rencontres car, finalement, ce sont elles qui nous font avancer 🙂 A très bientôt j’espère

  4. Nicolas

    Il faut du courage, de la persévérance avant toute chose, la chance ? Le destin…On n’en sait rien, par contre ce qui est sûr c’est que l’on est toujours admiratif des gens qui choisissent leur vie, de vivre de leur passion, telle qu’elle soit. Bravo Emilie, tu l’as fait, il y a tellement de gens qui n’oseront jamais, qui passent à côté de leur vie, qui subissent, tu aurais pu être comme eux. Tu as puisé en toi une force (une énergie) nécessaire pour réaliser ton projet, et je suis certain que tu l’échanges en bienveillance pour tes élèves pendant tes cours de yoga.
    Namasté

    1. Emilie

      Bonjour Nicolas. Merci mille fois pour ce joli message. Je ne sais pas s’il faut être admiratif, en tout cas je ne me vois pas fonctionner autrement 🙂 Cette façon de vivre et de faire mes choix est inhérente à ma personnalité. Je ne peux qu’encourager les autres à se lancer, avec bienveillance i.e. sans chercher à vendre du rêve non plus. Car rien n’est jamais acquis et il faut toujours s’accrocher 🙂 Namaste Nicolas.

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